La plus triste chaumière, si vous l'entourez de fruits, de quelques fleurs, prendra presqu'aussitôt un air de gaîté, de propreté, d'abondance ; au lieu de pierres amoncelées, de morceaux de bois épars, de cloaques, d'imondices de toute sorte, vous apercevrez un terrain nivelé, cultivé, soigneusement entouré de palissades ; au lieu de ronces qui envahissaient quelques arbres rabougris vous aurez des liserons, des capucines ; au lieu de lierre tapissant les murailles, vous aurez des treilles d'où pendront des grappes dorées ; vous cueillerez au printemps la cerise, la fraise, la groseille, un peu plus tard la prune veloutée, l'abricot, la poire, plus tard encore, vous récolterez des pommes que vous grignoterez l'hiver au coin du feu. (…) C'est pourquoi je mets à votre disposition le secours de mes faibles lumières et de mon expérience, je viens vous offrir quelques leçons amicales, quelques conseils, et je serais bien heureux, bien dédommagé de mes peines, si je vous voyais bientôt dociles à mes instructions, cultiver vous-mêmes votre petit jardin, planter des arbres, orner de fleurs les alentours de votre maison, si je vous voyais enfin prendre ces goûts simples et honnêtes qui répandent sur toute la vie les charmes d'une douce et tranquille uniformité. (…) Le soir, assis à votre porte, sur la pierre où s'asseyaient vos aïeux, vous contemplez toutes ces merveilles, vous goûtez cette joie tranquille qui prépare une nuit sans remords. Le matin, dès l'aube du jour, vous parcourez votre verger, vous comptez vos fruits, vous suivez avec intérêt leur accroissement rapide ; puis vous vous mettez à l'ouvrage, et si, vers le milieu de la course, le soleil vous force à fuir un instant l'ardeur de ses rayons, vous allez goûter un peu de repos sous ce grand chêne, au pied duquel est attachée la barrière de votre petit pré.
M. Sauvaget, Cours élémentaire d'horticulture à l'usage des écoles primaires, 1860 |